H.

by Mohammed El Amraoui

Il est étrange l’arbre

là-bas,

comment ça s’appelle,

dit H.

Si tu ouvres la fenêtre

vers cinq heures

du mat, tu verras

un type

qui rôde autour,

fait sa vidange,

puis encore fait le tour

comme pour chercher

quelque chose

puis gare ensuite

ses fesses sur le banc

à côté. Et c’est tous les jours

comme ça.

Rictus dilaté

par la peur,

sorte de sourire dévié.

Visage antique

à hauteur de non-sens :

comme épaisse

hétérogénéité, brune

foncée ou surface

criblée de balles.

Boutons noirs

et trous sourds

de toutes le tailles.

En diagonale, une cicatrice

marque un vieux

litige avec le monde.

La tête de ma mère, il est

étrange et barge cet arbre

qui pond chaque nuit

un mec pour pisser

sur sa tranche.

Tu vois

le paquet d’Camel,

y a quoi

sur le paquet

d’Camel,

y a un chameau,

et si tu vois bien entre

les deux pattes derrière

tu verras un type en miniature

qui pisse. Et c’est pareil.

Toutes les nuits. Toutes

les nuits, je le vois, ça

me réveille putain

et je dors pas loin. Et

j’arrive pas à piger.

Ma moelle atteint

les quatre vingt piges

dans un corps de trente cinq.

Et le ciel tout entier

s’engage à gauche

puis s’efface.

Je suis être sans ciel.

Sur les murs, des fenêtres

suspendues

frôlent le chaos.

Deux pigeons

au ras de nos têtes

s’envolent ta ta

tel un éclat de rire

affolés par une pluie

de miettes

puis se posent sur la route.

Sur l’un d’eux, parmi

les plumes blanches

jaillit une queue à

dominance de gris.

C’est une femelle qu’ils

viennent de rap

porter ici

pour sur

peupler les toits

de merde, de

résonances et de

funèbres arômes

dit H.

Fausse vie, roucoule !

Et la vie fausse

rou

coule

entre les dents et sous

les dents

mauves de barbus

qui, semble-t-il, assiègent

le rêve de toutes parts.

Je les ai vus

une fois encore

je monte je monte

les escaliers, la porte ouverte

entr’ouverte en pleine nuit.

Et l’étincelle.

Ils chauffent les lames.

Le tintement et le marteau

le chalumeau et les épées

et construisent le plan d’une ville

sainte

en fonction des projectiles.

La lumière maintenant

est une écume verte

le vent une toupie

qui décrit

des tournoiements de poussières

et d’idées durcies

par dessiccation

l’immeuble brandit

une pancarte

sur le toit

parmi les miroirs

paraboliques des antennes

où convergent

les fantasmes et les nerfs

splanchniques

la rue s’évase

dans une démarche de femme.

Le tout secoué par un

crachat de H.

au milieu d’une phrase.

H.

by Mohammed El Amraoui

It’s strange, that tree

over there

what’s it called,

says H.

If you open the window

at five

in the morning, you’ll see

the type

that drives around,

changing his oil,

then does the rounds again

as if looking for

something 

then parks

his ass on the bench

nearby. And it’s always 

like that. 

Grin gaping

from fear,

a deflective smile. 

Elderly face

at the height of nonsense:

deep

sameness, dark

brown, a surface

riddled with bullets. 

Blackheads

and pockmarks

of all sizes.

Diagonal, a scar

marks an old

dispute with the world.

My mother’s face, crazy
and strange, that tree

which each night

conjures a guy to piss

on its roots. 

You see

that pack of Camels,

what’s on

the pack
of Camels,

it’s a camel

and if you look close between

the two hind legs

you’ll see a little guy

pissing. And it’s the same.

Every night, every 

night, I see it, 

it fucking wakes me up

and I can’t go back to sleep. 
And I just don’t get it.

My spine feels eighty

in a body of thirty five.

And the whole entire sky

begins to the left

then erases itself.

I am skyless.

On the walls, some windows

dangling

graze the chaos.

Two pigeons

at eye level

take off, ta ta

like shards of laughter

terrified by a rain

of crumbs

alight on the road.

On one of them, among

white plumes

bursts a line

of stark gray. 

It’s a female that they

have just brought here

to overcrowd the roofs

with shit, with

echoes, with

deathly smells

says H.

False life, coo!

And false life

coo

coos

between teeth and on

the purple

teeth of bearded men

who, it seems, besiege

the corners of every dream.

I saw them 

once, again

I climbed, I climbed

the stairs, the open door

ajar at night.

And the spark.

They heat the blades.

Clank and hammer

blowtorch and swords

and they construct a plan for a holy town

in the path of projectiles. 

The light now

is a green foam;

the wind, a spinning top

that describes

twirling specks of dust

and thoughts hardened

by desiccation

the building brandishing

a sign

on the roof

among the mirrors,
the parabolas of antennas
where spirits 
and splanchic nerves

converge

the road widens

in a woman’s steps.

All this is shaken
by H. spitting

in the middle of a sentence.

 

translated from French by Sam Ross
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